dimanche 5 mai 2013

Histoire d'une confusion (I): 1555, premières descriptions


Conrad Gesner
(de Wikimedia)
Conrad Gesner ou Geßner fut un important naturaliste suisse à son époque, considéré comme le père de la zoologie moderne ; il est en effet l’auteur de Historiae animalium, œuvre de plus de 4 500 pages en cinq tomes. Les quatre premiers, consacrés aux mammifères (Quadrupedes vivipares), aux quadrupèdes ovipares (Quadrupedes ovipares), aux oiseaux  (Avium natura)  et aux animaux aquatiques (Piscium & aquatilium animantium natura) furent publiés entre 1551 et 1558 et un cinquième, consacré aux serpents et scorpions,  fut publié à titre posthume. Les quatre premiers tomes furent réédités en allemand en 1563 sous le titre de Thierbuch. Il s’agit de l’un des premiers traités d’histoire naturelle qui comprend d’abondantes illustrations en couleur d’animaux dans leur milieu et le premier qui comporte des illustrations de fossiles.

Gesner étudia dans un certain nombre de villes européennes : non seulement à Zurich, mais à Strasbourg, Bâle, Montpelier ou Bourges. C’est le premier auteur à avoir décrit l’ibis chauve clairement et sans équivoque. 



La gravure de Gesner représente un jeune ibis chauve de façon assez réaliste. Dans la partie supérieure, nous voyons l’image de l’édition latine et en dessous celle de l’édition allemande.



 L’image fut copiée ultérieurement par Aldrovandi dans sa publication de 1603 et par John Jonston dans la sienne, en 1657.
Conrad Gesner mourut de la peste à 49 ans au cours de l’une des épidémies récurrentes qui suivirent la grande pandémie connue comme la peste noire.

Si vous vous intéressez à l’œuvre de Gesner, elle est scannée sur internet. Le troisième tome, Avium natura, se trouve ici.

  
Pierre Belon
(de Wikimedia)
Pierre Belon n’était pas un naturaliste typique à son époque. Il participa à l’un des premiers voyages scientifiques de l’histoire, dans l’est de la Méditerranée et le Proche-Orient, notamment en Grèce, Turquie, Arabie, Égypte, etc…, pendant trois ans, entre 1546 y 1549.
Il eut une mort violente dans des circonstances qui restent obscures : il fut assassiné dans le Bois de Boulogne alors qu’il retournait au Château de Madrid, où il logeait.
Considéré comme le précurseur de l’anatomie comparée, il réalisa un important travail dans L'Histoire de la nature des oyseaux, qui est disponible en ligne. Cependant, son œuvre fut éclipsée par la plus complète Historia animalium de Conrad Gesner, publiée le même année 1555

Dans le chapitre consacré au cormoran, Belon décrit très bien ses habitudes, qu’il a probablement observées dans la nature. Il explique clairement qu’il s’agit de l’une des rares espèces qui, tout en étant palmipède, s’accroche aux branches. Toutefois, l’illustration, censée être réalisée d’après nature, montre un oiseau bien distinct.

La posture droite n’est pas du tout typique des cormorans et il s’agit clairement d’un oiseau fissipède, sans membrane interdigitale. Le profil général montre un oiseau plus compact, mais ressemblant à l’ibis chauve, malgré l’absence de la huppe de plumes caractéristique.
Il semble qu’il existait une certaine confusion entre l’ibis chauve et le cormoran, qui apparaît clairement dans le nom générique de celui-ci. Pour lever le doute, Belon déclare : Phalacrocorax & Coroni thalassios en Grec, Corvus aquaticus en Latin, Cormarant en Francoys. C’est-à-dire que le "corbeau chauve" (phalacrocorax) et la "corneille marine" (coroni thalassios) deviennent synonymes. D’autres auteurs, d’abord Gesner, mais également Aldrovandi, essaieront d’approfondir les différences, mais le germe de la confusion était déjà semé.



Traduction: E. Langrené

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...